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mardi, octobre 16, 2007

La science et l'écriture

La science et l'écriture

Si l’expression, la communication sont des systèmes communs à tous les animaux, voire aux végétaux, l’écriture me semble bien être une des caractéristiques de l’être humain. Il s’agit d’un langage codifié et transposé : en cela, n’est-ce pas là un des premiers actes scientifiques.

D’autant plus que l’écriture a permis de réfléchir ou du moins d’aider à la réflexion, notamment scientifique. Sans parler de son statut de véhicule de la science. Pensons aux quelques lignes écrites par Einstein, pour ne citer que cet exemple, et qui ont révolutionné la physique.

Evidemment, de par son manque d’universalité, l’écriture d’une langue peut aussi être une barrière à la compréhension. Alors que l’écriture mathématique, sans être totalement universelle, permet de passer outre beaucoup de frontières linguistiques.

Le support écrit reste primordial dans la transmission du savoir et donc dans l’apprentissage des sciences, sujet qui nous occupe ici.
Ceci vaut pour la lecture mais l’élève doit également maîtriser l’écriture pour décrire la réalité qui l’entoure. Qu’elle soit scientifique, sociologique, économique ou encore philosophique.

Autant dire que lire et écrire sont deux « techniques » indissociables et indispensables pour appréhender le réel, le monde qui nous entoure, le décrire, le comprendre, le prévoir, le préserver… le transmettre.

Si l’acte de lire permet de connaître, de prendre des décisions (lecteur=électeur), de réagir, celui d’écrire s’inscrit directement dans l’action. Pour employer une formule forcément réductrice mais évocatrice : lire permet d’ingérer, d’intégrer la société et écrire permet d’interférer, d’agir, de s’engager dans cette même société. Comprendre d’abord pour mieux faire évoluer voire changer le monde.

L’acte d’écrire n’est jamais innocent, jamais sans risque. Lorsque l’on écrit, on s’expose, on se dévoile. Sans faire de la psychanalyse à bon marché, les mots utilisés, au-delà de leur sens premier, révèlent l’endroit d’où l’on parle : un lieu historique, contextuel où l’éducation, l’instruction, les influences familiales, amicales et médiatiques sont à la fois guides et limites.

Autant de facteurs qui rendent difficile l’utilisation de l’écriture, en sciences ou ailleurs. Le regard des autres (du prof et des autres élèves) constitue bien souvent un frein. L’impression de ne pas savoir quoi écrire, que l’on ne maîtrise pas le sujet, le manque de vocabulaire, la peur de se tromper empêchent de se lancer à l’assaut de la page blanche.

L’enseignant doit jouer le rôle de détonateur, de lanceur de fusée dans ce cas. Donner confiance à l’élève en ne stigmatisant pas, dans un premier temps, les fautes formelles, le poussant à écrire d’abord seul puis en groupe.
Pour l’enseignant, poser les bonnes questions et donc également maîtriser non seulement la matière scientifique mais également partager un lexique riche (vocabulaire juste, précis, variés) avec ses élèves, tenter, lui aussi, l’exercice de l’écriture contribuera à ouvrir l’esprit des enfants.

Bien sûr, le prof de sciences ne peut pas faire tout, tout seul mais lui aussi doit y contribuer. Il doit donc lui aussi, montrer l’exemple. Comme ses collègues. Comment ? En utilisant des outils (livres, articles, Net) pour montrer que si on lit des infos, c’est qu’elles ont été écrites. Si on connaît encore les grandes découvertes et inventions, c’est parce qu’il en existe une trace écrite. Si des savants se doublaient de philosophes, c’est qu’ils pensaient le monde, ont voulu le comprendre, parfois le modifier mais surtout partager leurs expériences. Alors, pourquoi pas eux, les élèves ?

Cultiver l’esprit d’observation, fournir les outils du langage pour décrire, susciter la réflexion par un questionnement, donner la parole d’abord avant de l’écrire (du style : « Et bien, tu m’a très bien décrit ce qui se passait, ce que tu voyais. Donc, maintenant, tu ne peux plus dire que tu n’as rien à écrire… »), voilà bien quelques rôles de l’enseignant, non ?

Yvan Scoys